Voyage en Italie de Roberto Rossellini

Affiche du Film

Comme je consacre ce mois de janvier au thème du voyage, il m’a semblé opportun de voir ce grand classique italien des années 1950 : « Voyage en Italie » de Roberto Rossellini (1906-1977). Pour en avoir déjà vu de nombreux extraits, je savais à peu près de quoi il retournait et j’en avais gardé en mémoire quelques images fortes, mais, bien sûr, le visionnage complet m’a réservé de nombreuses surprises et des sujets d’intérêt inattendus.

Note Pratique sur le film

Nationalité : Italien
Date de sortie initiale : 1954
Noir et Blanc, V.O. Italienne sous-titrée français
Rôles principaux : Ingrid Bergman (1915-1982) et George Sanders (1906-1972)
Durée : 1h20

Quatrième de Couverture du DVD

Un couple de bourgeois anglais arrive à Naples pour régler une affaire d’héritage. Leur découverte de l’Italie ira de pair avec la mise à nu de leur mariage et la prise de conscience de leur incommunicabilité… Intégrant le néo-réalisme à l’étude psychologique, Rossellini instaure avec Voyage en Italie une nouvelle forme de narration cinématographique qui préfigure tout autant le cinéma d’Antonioni que celui de la Nouvelle Vague.
(Source : DVD)

Mon Avis

Dans cette histoire, le thème du voyage est au moins aussi important que celui du mariage en crise. C’est à cause de ce voyage à deux que tous les problèmes de ce couple éclatent au grand jour et prennent de plus en plus d’ampleur. Comme ils le disent dès les tout débuts du film, ils sont mariés depuis huit ans et n’ont pas l’habitude, dans leur vie quotidienne, de se retrouver en tête-à-tête car une société nombreuse gravite autour d’eux. Mais, avec ce voyage, ils sont obligés de se parler seul à seul et leurs conversations finissent toujours en incompréhension ou en dispute. Sur le fond, leurs caractères divergent profondément : il reproche à sa femme d’être trop sentimentale, trop éprise de choses « poétiques », tandis qu’elle reproche à son mari d’être trop froid, trop attaché à son travail, à la notion de devoir. En même temps, chacun nourrit une certaine jalousie et soupçonne l’autre de vouloir le tromper, de se montrer trop accueillant avec les possibilités de flirts.
Pendant ce voyage, ils vont vivre des expériences séparément, chacun selon ses aspirations. Pendant que le mari essayera de nouer des liaisons féminines extra-conjugales, sans grand succès, la femme va multiplier les visites culturelles et touristiques à Naples et dans les alentours. La plupart de ces excursions, en compagnie d’un guide occasionnel, seront marquées de plus en plus nettement par l’idée de la mort (Vésuve en ébullition, catacombes, ruines de Pompéi avec les corps pétrifiés). Ces visites culturelles sont comme une échappée de la fiction vers le pur documentaire et le spectateur a l’impression assez étrange de se promener dans les musées napolitains des années 1950 ou de déambuler au milieu des squelettes avec un commentaire de l’époque. Mais nous nous rendons compte que ces multiples rappels de notre mortalité vont avoir un fort impact sur cette touriste anglaise et lui rappeler, peut-être, les choses les plus essentielles à ses yeux.
Un autre thème intéressant, même s’il est plus discret, est celui de la naissance, de la maternité et des petits enfants. En effet, ce couple n’a pas d’enfant et, lorsque la dame anglaise se promène en voiture dans les rues de Naples, elle ne peut s’empêcher de remarquer, avec un sourire de sympathie, les nombreuses femmes enceintes et toutes les promeneuses qui s’accompagnent de poussettes. Et, à la fin du film, nous comprenons qu’il y avait là un des principaux problèmes de ce couple, un non-dit parmi tant d’autres, qui envenimait leurs relations.
(J’ajoute que j’étais bien contente de constater qu’un film d’1h20 peut être un des chefs d’œuvre du septième art, ce qui contraste avec la mode actuelle des films deux à trois fois plus longs et qui ne sont pas toujours aussi beaux…)
Un film magnifique, aux dialogues très riches, aux images et aux lumières sublimes, et que je reverrai certainement avec le même plaisir et le désir de saisir ce qui a pu m’échapper aujourd’hui !

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Scène du film (en voiture)

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Je profite de cet article, programmé de longue date, pour lui ajouter quelques vœux de circonstances. Je vous souhaite à tous une excellente année 2024, une santé resplendissante, de l’amour, de l’amitié, des projets épanouissants et de la poésie sous toutes ses formes : que les belles choses de l’existence vous accompagnent !

18 réflexions sur “Voyage en Italie de Roberto Rossellini

  1. Voilà qui me donne envie de le voir, les non-dits qui traversent le film me semblent très intéressants et j’aime beaucoup Ingrid Bergman. Belle année à vous !

  2. L’ai je vu, je ne sais plus. Ah…Ingrid Bergman, quelle classe !

    Connais-tu ce disque de Marc Antoine Charpentier Motet à quatre choeurs, carnet de voyage en Italie, par l’ensemble correspondance. A mes oreilles, un bijou.
    Belle année Marie-Anne.

    1. Je suis en train d’écouter sur YouTube cette vidéo :

      Les extraits de musique sont malheureusement assez courts mais les explications sont intéressantes.
      Merci pour cette référence 🙂 Bonne journée !

      1. et du coup je viens de regarder cette vidéo qui est vraiment très intéressante. Je connais très bien l’œuvre de Charpentier et je découvre encore ! belle journée

  3. Bonsoir Marie-Anne,
    Je suis d’accord avec toi. C’est un chef-d’oeuvre. Ingrid Bergman et George Sanders sont excellents. Lire ta chronique m’a rappelé l’émotion que j’avais pu ressentir à la première vision de ce « film magnifique ». Je ne me lasse d’ailleurs pas de le revoir.
    Merci pour tes vœux. A mon tour de te souhaiter une belle année 2024 ! Amitié,
    Ana-Cristina

    1. Bonsoir Ana-Cristina, merci de ton commentaire et de tes voeux ! Je te souhaite tout le meilleur pour 2024 ! Avec de belles découvertes littéraires, cinématographiques et artistiques ! Bien amicalement, Marie-Anne

  4. C’est une très belle declaration d’amour au film de Rossellini que tu nous offres là Marie-Anne. Je ne suis pas loin de te rejoindre sur ce portrait en creux du couple que formaient alors l’actrice et le réalisateur. Quant à George Sanders, il est comme bien souvent tout à fait admirable.
    A mon tour de te souhaiter une belle année 2024.

    1. Merci Prince Ecran Noir ! On se doute, en effet, devant ce « Voyage en Italie » que Rossellini a dû puiser dans ses propres problèmes de couple pour inventer cette histoire. Très belle année à toi ! Meilleurs voeux !

  5. Du « bas » de mes 69 ans je souscris à ce que tu viens d’écrire. Je l’ai vu au moins 4 fois et à chaque vision je « découvre » des moments, de répliques qui résonnent – souvent avec la patine de l’âge et de mes propres « expériences » – un film à multiples facettes – et la fin m’émeut toujours, comme certains regards (tellement parlant) et silences… et qu’est-ce que j’aime la voix de G. Sanders…..

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