Nagori de Ryoko Sekiguchi

couverture chez folio

Ce livre m’a été offert pour Noël par une amie poète, et c’était un heureux hasard car je l’avais déjà repéré en me promenant dans ma librairie préférée : la jolie couverture aux fleurs de cerisiers et aux accents japonisants avaient attiré mon attention et je m’étais promis de l’acheter un jour ou l’autre !
J’ai appris que l’autrice Ryoko Sekiguchi est une poète, écrivaine et traductrice japonaise, née à Tokyo en 1970, et installée en France depuis 1997. J’ai aussi appris qu’elle écrit directement en langue française depuis 2003. Elle est souvent publiée chez POL – ce qui est aussi le cas pour Nagori , paru en 2018 – mais j’ai lu ce livre dans sa version poche, chez Folio.

Présentation du Livre et Avis :

Ce livre un peu inclassable est une réflexion sur le thème des saisons, particulièrement apprécié et développé dans la culture japonaise, et l’autrice mêle les considérations culinaires, sémantiques, géographiques, philosophiques, poétiques, botaniques, historiques, etc. pour nous donner une perception plus fine et plus profonde des différentes saisons et de la signification des saisons dans notre existence.
Il ne s’agit pas pour l’écrivaine de détailler les particularités de chacune des quatre saisons – puisqu’après tout nous les connaissons déjà parfaitement – mais elle veut plus exactement faire ressortir l’essence (et les sens) des saisons, nous en donner une sensation poétique.
Il est bien sûr fait référence aux haïkus et à la tradition des « mots de saison » qui doivent normalement être insérés dans ces brefs poèmes, s’ils veulent obéir aux règles strictes de composition. Ce sujet est l’occasion pour Ryoko Sekiguchi d’expliciter de très intéressantes réflexions sur la politique japonaise et la manière d’envisager certains problèmes de société au Japon.
Plus qu’à tout autre sujet, l’écrivaine accorde une attention importante aux « produits de saison », surtout aux fruits et légumes, et à la manière de les déguster plus ou moins tôt dans la saison, voire « hors saison », ou de les accommoder les uns avec les autres selon des temporalités variées. Et c’est là le petit bémol que je pourrais mettre sur ce livre : j’ai trouvé les considérations alimentaires parfois un peu trop appuyées et développées, au détriment d’autres aspects des saisons, comme le climat, la chaleur, la lumière, et d’autres sujets qui ne sont presque pas abordés ici.
Malgré cette petite réserve, j’ai apprécié ce livre qui nous aide à mieux ressentir la poésie de nos vies quotidiennes et nous en fait percevoir les savoureuses subtilités !

Un Extrait page 27 :

Les Japonais entretiennent avec les saisons une relation particulière, c’est bien connu, même en France, et l’on trouve de nombreux textes sur ce sujet. Moins connue, en revanche, est cette notion qui mérite d’être évoquée, et que l’on pourrait qualifier de « vie d’une saison ». Ce n’est pas seulement l’année, avec son tour des quatre saisons, qui est comparée à la durée d’une vie humaine ; chaque saison contient une vie entière, traversée par différents êtres vivants, chacun doté d’une vie propre.
Ainsi, il existe trois termes différents pour décrire l’état de saisonnalité d’un aliment : hashiri, sakari, et nagori. Ils désignent l’équivalent de « primeur », de « pleine saison », et le dernier, nagori, de l’arrière-saison, « la nostalgie de la saison qui vient de nous quitter ».(…)

Un autre Extrait page 51 :

Les quatre saisons introduisent dans notre vie l’idée de cycles qui se répètent, un peu à la manière d’un escalier en colimaçon. Pourtant, le temps de notre vie progresse, lui, selon une linéarité à sens unique, vers une dégénérescence irréversible. Cette temporalité interne, inhérente à notre corps, renforce encore notre aspiration aux saisons, au renouveau, à la renaissance.(…)

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Sur « Les Saveurs du Palais »

Hortense Laborie, chef cuisinier dans le Périgord, se voit un jour convoquée à Paris pour travailler au service d’un « haut fonctionnaire ». Elle apprend à son arrivée dans la capitale que ce haut fonctionnaire n’est autre que le Président de la République et que son travail consistera à lui préparer tous ses repas privés. Elle accepte (mais a-t-elle vraiment le choix ?) et se retrouve confrontée à divers soucis : respect du Protocole très strict de l’Élysée, rivalités avec l’autre cuisine du Palais (« la Centrale »), contraintes diététiques qui lui seront imposées quand la mauvaise santé du Président commencera à l’exiger.

 

C’est un film assez agréable à suivre, même quand on est peu intéressé à priori par les arts de la table. Une tension s’installe dès le début et on se demande si l’héroïne  parviendra à trouver sa place à l’Élysée et si ses plats sauront séduire le Président.
Ce climat d’appréhension et d’effervescence est bien mis en valeur par Catherine Frot, comme toujours parfaite, sur le visage de laquelle se lisent toutes les émotions.
Jean d’Ormesson se tire plutôt bien de son rôle et est même convaincant en Président de la République : il montre du naturel dans son jeu et possède un certain charisme – j’étais agréablement surprise.

Le défaut majeur des Saveurs du Palais est sa fin – et, d’une manière générale, toutes les scènes qui se déroulent en Antarctique (ou en Arctique ? Désolée, je n’ai pas vraiment suivi, mais en tout cas il fait froid) – ces scènes n’ont pas d’intérêt du tout.

Si jamais ce film vous tente je vous conseillerais d’aller le voir à la séance de 18 heures et de prévoir un restaurant après car Les Saveurs du Palais donnent extrêmement faim !