Deux de mes derniers poèmes rimés

J’ai écrit ces poèmes au printemps et été 2021.
Merci de ne pas les diffuser sans mon autorisation.

transilien, intérieur du train

Eloge de la SNCF

Rouler en transilien dans la campagne rase,
Voir filer les hameaux tagués et les terrains
Vagues, ce n’est pas très folichon, à la base.
Un genre de torpeur fadasse vous étreint.

De gare en gare, nous roulions dans cet écrin
D’ennui morose, quand j’entendis cette phrase,
Dite sur un ton simple, aimable et sans emphase :
« Prenez garde à la marche en descendant du train ! »

Que la SNCF parle en alexandrin
Au pauvre banlieusard que son train-train écrase,
Cela aurait de quoi me mener à l’extase
(Est-ce excessif ? Un brin ? Sans frein ? Ou a tout crin ?)

Maintenant, chaque fois que j’ai l’esprit chagrin,
Je pense à cette phrase audacieuse et courtoise
Qui me sied ! Pour un peu, je me croirais en phase
Avec ce monde ultra-néo-contemporain.

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Eloge de la Bêtise

Je suis bête mais c’est à moitié fait exprès
Et je n’ai de l’esprit que par inadvertance
Mais j’en ai d’autant plus que j’entre dans la danse
De plus crétins que moi (à ce qu’il me parait).

Les intellos pédants qui tiennent toujours prêt
Un fumeux paradoxe empreint d’intelligence,
Je leur sors aussitôt une plate évidence,
Digne de Lapalisse – ils en sont pour leurs frais !

Par l’électrique essor de leurs brillants neurones
Ils croient pouvoir prétendre aux merveilleuses zones
De tranquille bonheur où ma stupidité

Me mène sans effort ni qualité majeure.
Ils sont trop malins pour voir cette vérité :
La raison du plus bête est toujours la meilleure !

Marie-Anne Bruch

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Un poème contemporain sur la mer

J’ai trouvé ce poème de François de Cornière dans la revue Décharge numéro 157 : j’ai trouvé intéressant de le reproduire ici après les poèmes de José Maria de Heredia sur le même thème – ici, ce n’est pas le paysage qui intéresse le poète mais les paroles et les interactions humaines.

 

bord_de_mer

 

Des phrases

 

Des phrases il y en avait
qui revenaient toujours:
« N’allez pas trop loin ! »
« Elle monte ou elle descend ? »
« Comment tu la trouves ? »
et bien sûr aujourd’hui :
« Elle est super bonne ! »

C’étaient des phrases du bord de mer
qu’on entendait passer ainsi
depuis tant d’années
comme une sorte de bande son
– ineffaçable pourtant fragile –
des étés de nos vies.

Des phrases qui nous racontent
des phrases qui nous ponctuent
et qu’on connait par cœur
quand je te dis
déjà sur mon vélo
et prêt à m’envoler :

« Je reviens tout de suite
je vais voir la mer. »