Ces Poèmes sur la couleur noire sont extraits du beau recueil « Noir suivi de Métamorphose du corps noir » publié chez éditinter poésie en décembre 2019. Les textes sont accompagnés par des peintures de Jean-Michel Marchetti, dans des nuances de noirs plus ou moins mats ou intenses.
Note sur le poète
Jean-Claude Tardif naît à Rennes en 1963, dans une famille ouvrière. Polygraphe, certains de ses textes ont été traduits en allemand, espagnol, italien, portugais… Il a publié dans de nombreuses revues tant hexagonales qu’étrangères et est présent dans plusieurs anthologies consacrées à la poésie contemporaine. Revuiste, il créa la revue Le Nouveau Marronnier (1985-1991). Il dirige depuis 1999 la revue A l’Index. Parallèlement, il a animé de 1997 à 2013 les rencontres-lectures « Le Livre à dire » où il a reçu des écrivains et des artistes d’aujourd’hui, tant français qu’étrangers.
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Page 12
Noir
Facile à épeler à prononcer
pour tout dire monosyllabique
pourtant que de profondeur
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Page 31
Un corps noir ;
substrat de lumière ou agrégat d’obscurité
Les planètes tournent autour de la question
l’œil parfois s’y perd
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Page 44
La nuit le corps est-il plus loin que lui-même
est-il ailleurs
en périphérie des rêves qui l’habitent
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J’ai lu ce recueil dans le cadre de mon « Printemps des artistes » de 2022, puisque ces poèmes évoquent une couleur et s’enrichissent de peintures.
N’ayant encore jamais parlé de littérature hollandaise sur ce blog, il était temps que je lui accorde une place ici et c’est l’écrivain-poète Cees Nooteboom, particulièrement renommé et important dans la littérature européenne, que j’ai choisi d’évoquer en tout premier lieu. J’ai trouvé ces poèmes très beaux et d’une tonalité mélancolique et souvent métaphysique (interrogations sur l’au-delà, sur le Temps qui passe, sur le malheur et la souffrance ou encore sur le pouvoir de la poésie) qui s’adresse à la fois à la pensée et au cœur – et nous invite à voir plus loin en nous-mêmes. Une parole précieuse, qui exprime une recherche au-dedans de soi et, me semble-t-il, une forme de sagesse.
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Note Pratique sur le Livre :
Titre : L’Œil du moine suivi de « Adieu » Editeur : Actes Sud Année de Parution en France : 2021 (2020 aux Pays-Bas) Genre : Poésie Traduit du néerlandais (Pays-Bas) par Philippe Noble Nombre de Pages : 90.
Note sur le poète
Né en 1933 à La Haye, Cees Nooteboom, écrivain nomade, s’est imposé comme l’un des plus grands auteurs européens contemporains. Il a reçu d’éminentes distinctions littéraires aux Pays-Bas, en Allemagne, en Autriche et en Espagne, où il a obtenu en 2020 le prix Formentor. Ses livres sont traduits dans le monde entier. En 2016, une anthologie poétique est parue chez Actes Sud : Le Visage de l’œil. En 2020, toujours chez Actes Sud : Venise. Le lion, la ville et l’eau. (Source : éditeur)
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(Page 30 – Extrait du recueil « L’Œil du moine »)
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De tous les rythmes c’est le jour et la nuit qu’il trouvait le plus beau. Un, deux, et Dieu merci pas trois. Cela viendrait plus tard, quand tout serait fini, un chiffre obscur
sous le masque d’un zéro. Comment naît une œuvre d’art ? Quand commence un motet, un poème, une lumière qu’on croit sans origine ? Qui pense un premier vers avant que de penser ?
Ou comment d’un marais de reflets, d’un combat de boue entre un alors et la fiction d’un maintenant, un seul instant visible advient où le temps ne mesure pas
ce qui trépasse.
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(Page 38 – Extrait du recueil « L’Œil du moine »)
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Partant du fait qu’il n’y avait rien, tout étant sans être là, une obscure carence, cette question posée au cygne sur l’eau sombre stagnante, celle du pourquoi.
Le cygne dit sa forme pour seule vérité mais l’homme, en forme de son ombre, attendait mieux, le goût d’une réponse attaquant les ténèbres,
à laquelle les mots manquaient. Ainsi des heures durant restaient-ils sans bouger, cygne contre homme, homme contre cygne. Le poème qu’ils devinrent s’écrivit en silence
mais sans langage.
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(Page 75 – Extrait du recueil « Adieu »)
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Tu voulais vivre, non ? N’aurais-tu donc voulu que l’or, le bleu du ciel, l’amour, le soleil ? Rien n’est ici gratuit, collectionne
la mort dans tous ses avatars, la douleur, le cri, l’étreinte maléfique, le baiser d’une trahison ourdie.
La vie, cantique des cantiques ? Bien sûr, mais en-dessous cette autre vérité de nuit et de brouillard, preuve par neuf qui dure