J’ai trouvé ces deux poèmes de Roberto Juarroz dans son livre Quinzième Poésie Verticale, disponible chez José Corti.
J’aime vraiment beaucoup ces poèmes, qui me semblent proches de la perfection.
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22
La fumée est notre image.
Nous sommes le reste de quelque chose qui se
consume,
une évanescence difficilement visible
qui se désagrège dans cette hypothèse du temps
comme une promesse non tenue
peut-être formulée à une autre époque.
Volutes d’une combustion qui ne parvient même
pas
à modérer le froid d’un hiver
sur cet îlot perdu,
qui devra lui aussi se changer en fumée.
(…)
***
2
Chaque texte, chaque mot change
selon les heures et les angles du jour et de la
nuit,
selon la transparence des yeux qui les lisent
ou le niveau des marées de la mort.
Ton nom n’est pas le même,
ma parole n’est pas la même
avant et après la rencontre
avant et après avoir repensé
que demain nous ne serons plus.
Toute chose est différente
regardée de jour ou de nuit,
mais ils deviennent plus différents encore
les mots qu’écrivent les hommes
et les mots que n’écrivent pas les dieux.
Et il n’y a aucune heure,
ni la plus prometteuse, la plus lucide, la plus
impartiale,
ni même l’heure sans quartiers de la mort,
qui puisse équilibrer les reflets,
ajuster les distances
et faire dire aux mêmes mots les mêmes choses.
Chaque texte, chaque forme, qu’on le veuille
ou non,
est le miroir changeant, chatoyant,
de la furtive ambiguïté de la vie.
Rien n’a une seule forme pour toujours.
Même l’éternité n’est pas pour toujours.
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Eleonore
/ 13 juillet 2019Le dernier est très philosophique !
Ils sont magnifiques.
Merci Marie-Anne.
Très belle fin de semaine à vous.
laboucheaoreille
/ 14 juillet 2019Oui, c’est un poète très philosophique, qui médite sur le sens des choses ! Bon dimanche Eléonore !
lesfaitsplumes
/ 13 juillet 2019Et toujours cette métaphore de la marée 💜💙, merci la bouche à oreilles pour ce partage…
laboucheaoreille
/ 14 juillet 2019Moi aussi j’aime ces « marées de la mort » et de la vie ❤ Merci Les Faits Plumes !
toutloperaoupresque655890715
/ 13 juillet 2019J’ai aimé ces poèmes, surtout le deuxième avec sa composante Jankélévitchienne du temps qui passe et qui fait que tout change et que rien n’est jamais le même. Le sens des mots même est victime de ce sortilège du temps.
laboucheaoreille
/ 14 juillet 2019Oui, et ça se vérifie très souvent ! Quand on relit un livre, la deuxième lecture laisse des impressions bien différentes de la première. Merci Tout l’Opéra (je ne sais pas votre prénom) et bon dimanche !
toutloperaoupresque655890715
/ 14 juillet 2019Mon prénom est Jean-Louis.
Très bon dimanche.
laboucheaoreille
/ 15 juillet 2019D’accord Jean-Louis ! Merci 🙂
laurence délis
/ 13 juillet 2019Superbe ! Les deux poèmes choisis me semblent similaires sur la notion du temps qui passe et j’aime particulièrement leur simplicité profonde. Merci pour la découverte Marie-Anne
laboucheaoreille
/ 14 juillet 2019Merci Laurence ! Je trouve aussi ces poèmes assez similaires, le premier a peut-être une tonalité plus mélancolique. Mais, en effet, les deux évoquent nos changements à travers le temps, notre côté éphémère.
princecranoir
/ 15 juillet 2019Je ne connaissais pas et je découvre un auteur sublime. C’est en tout cas l’effet que me fait la première strophe du premier des 2 poèmes ici publiés. Merci pour cette découverte !
laboucheaoreille
/ 16 juillet 2019Oui, c’est un poète sublime, l’un de mes préférés ! Merci à vous d’avoir apprécié !
walachniewicz
/ 19 juillet 2019Sublime c’est le mot puisque les autres me manquent…
laboucheaoreille
/ 22 juillet 2019Heureuse qu’ils vous plaisent ! Merci de votre lecture et de vos mots !