J’ai trouvé ces deux poèmes dans le recueil « Une vie ordinaire », sorte d’autobiographie en octosyllabes qui date de 1967.
Georges Perros (1923- 1978) était également acteur puis lecteur chez Gallimard.
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Je suis un homme maintenant
et pourrais être militaire
et quand on me dit de parler
je sais pourquoi je dois me taire
Quoique me sentant peu au monde
je dis bonjour ça va bonsoir
à mes semblables que je croise
et qui me le rendent parfois
Certes je sais que mon royaume
est bien de ce monde Voilà
ce qui m’embarrasse plutôt
je récupère mal le temps
que j’ai passé à faire l’âne
en laissant ma pauvre maman
s’occuper à torcher mon cul
à me donner le sein si tant
il est vrai qu’elle fit ce geste
de laiteuse et pâle tendresse.
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J’avance en âge mais vraiment
je recule en tout autre chose
et si l’enfance a pris du temps
à trouver place en moi je pense
voilà qui est fait et je suis
devenu susceptible au point
qu’on peut me faire pleurer rien
qu’en me prenant la main Je traîne
en moi ne sais quelle santé
plus prompte que la maladie
à me faire sentir la mort
Tout m’émeut comme si j’allais
disparaître dans le moment
Ce n’est pas toujours amusant.
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Goran
/ 29 novembre 2016Tes choix sont toujours splendides…
laboucheaoreille
/ 29 novembre 2016Merci beaucoup Goran !
J’ai un vrai coup de cœur pour ce poète 🙂
Goran
/ 29 novembre 2016🙂
'vy
/ 29 novembre 2016« ce geste de laiteuse et pâle tendresse »… j’ai les Papiers collés de Georges Perros, livre que je n’ai pas encore lu.
laboucheaoreille
/ 29 novembre 2016Oui, c’est un livre très connu également mais je ne l’ai pas lu non plus … je peux dire en tout cas que « Une vie ordinaire » m’a beaucoup plu, j’aime bien ce langage proche de la langue parlée et en même temps très ciselée, très réfléchie.
camelliaburows.com
/ 30 novembre 2016Superbe !
laboucheaoreille
/ 30 novembre 2016Merci !
arbrealettres
/ 30 novembre 2016Poème sur la vie intérieure la vie d’être conscient pas toujours facile à vivre! ;-).
laboucheaoreille
/ 30 novembre 2016J’aime bien maintenant les poèmes sur le vieillissement, sans doute parce que le sujet commence à me concerner 🙂
J
/ 1 décembre 2016Très beaux poèmes, le second est mon préféré. Je leur ai trouvé une belle touche Cioranesque, et effectivement après recherche il se trouve que Perros était un lecteur assidu de Cioran. En tout cas je ne connaissais pas, un grand merci pour cette découverte.
laboucheaoreille
/ 1 décembre 2016Je ne connaissais pas ce lien entre Perros et Cioran, merci de l’avoir mis en relief !
Contente que ces poèmes vous aient plu !