Ces deux poèmes sont parus dans la revue A l’Index n°21 de septembre 2012.
Papier d’Identité
Sans miroir, je n’ai pas de visage
Juste un trou avec le monde dedans.
Ma date de naissance est à moitié morte
Comme les gauchistes et le LSD.
Mon prénom est bien la fille de ma mère,
ange gardien ou chaperon.
Je suis moins dans mes coudes que dans mes mains
Dans mes oreilles que dans mes yeux.
Je crois en ce temps des limbes
Où j’ai tiré mon sexe à la courte-paille.
Mon nom est un souvenir d’enfance.
J’ai des points communs
Avec le chat du voisin.
Je me récite par cœur.
Souvent, je me confonds
Avec le premier venu.
Influençable
Chaque jour depuis vingt-cinq ans, des gens viennent me demander pourquoi j’ai les yeux bleus, pourquoi ma sueur sent la jacinthe sauvage et pourquoi j’aime les amandes de mer.
J’ai inventé pour tout cela des raisons convaincantes – que je répète comme un mainate enragé.
Mais aujourd’hui je me suis aperçue que mes yeux devenaient gris, que ma sueur tournait au zinnia fané et que je ne supportais plus que les bigorneaux.
Alors j’ai compris que je m’étais trop souvent justifiée.
Marie-Anne Bruch